Pour un Système d'Aide Médicale Européen (SAME)
- afmjsnord
- 5 déc. 2023
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 févr. 2024
I - Protection individuelle et collective
L’Aide Médicale d’Etat (AME) a été mise en place en 2005 par Martine Aubry et Bernard
Kouchner, dans le but de garantir une prise en charge quasi-intégrale des frais
médicaux des étranger.e.s en situation irrégulière. Aujourd'hui, cette aide sociale est
menacée par la droite extrême et de l’extrême droite, avec la complicité du
Gouvernement. Au-delà de la simple conservation de l’AME, nous revendiquons un
élargissement de celle-ci à l’échelle européenne.
Avec la probable arrivée de milliers de réfugié.e.s climatiques dans les décennies à
venir, l’Union Européenne se doit d’être à l’avant-garde des droits humains. La disparité
en termes de prise en charge médicale au sein des Etats membres ne correspond pas à
notre idéal commun, qui se veut universaliste et social. L’AME telle qu’elle est
actuellement conçue en France permet pour les étranger.e.s, même en situation
irrégulière, de bénéficier d’un accès aux soins, à condition d’être sur le territoire français
depuis au moins 3 mois et d’être en dessous d’un certain plafond annuel de ressources.
En d’autres termes, cette aide est quasi-universelle.
C’est pour cela que nous défendons l’instauration d’un Système d’Aide Médicale
Européen (SAME) : garantir à toutes et tous une protection médicale individuelle,
collective et préventive, peu importe l'État membre.
En outre, faire en sorte que chacun.e puisse être soigné à temps, c’est mettre en place
une politique publique efficace en matière de lutte contre les épidémies, voire contre
de futures pandémies. Soigner avant que la maladie ne devienne trop grave, c’est aussi
diminuer les frais pour les hôpitaux, car anticiper sera toujours moins coûteux que de
prendre en charge un.e patient.e déjà gravement malade. Ainsi, tous les Etats membres
ont à y gagner en terme d’efficacité du service public, puisque le SAME remplacerait les
dispositifs déjà existants comme en Espagne et en Italie, au profit d’une unification
européenne qui simplifierait les procédures administratives.
II - Solidarité européenne
Si l’UE doit se saisir de ce sujet, c’est en premier lieu parce qu’elle en a la capacité
juridique. L'article 168 du TFUE, au sein du Titre XIV sur la santé publique, dispose que :
« un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la
mise en œuvre de toutes les politiques et actions de l'Union. ». Par ailleurs, l’article 4 de
ce même traité indique que la santé fait partie des compétences partagées de l’UE.
Celle-ci peut donc agir sur les politiques de santé publique, et mettre en place le SAME.
Si le droit invite l’UE à se saisir de cette question, nous pensons qu’il en est aussi de son
devoir. En effet, la tendance générale est à la répartition des arrivant.e.s en Europe dans
l’intégralité des Etats membres. Mais de fait, il existe une inégalité de traitement pour
ces personnes migrantes, l’Europe sociale est donc imparfaite. Loin de proposer l’idée
d’une Europe fédérale et de la fin des prérogatives nationales, le SAME se veut une
garantie d’égalité et une facilitation des politiques d’accueil pour les États-
membres, notamment ceux du Sud qui font face aux plus grandes difficultés.
Ce dispositif serait financé grâce à de nouvelles ressources propres de l’Union,
permettant une mutualisation des nouveaux coûts engendrés, entrant dans le cadre
d’une solidarité européenne.
III - Défense des femmes
90% des femmes migrantes sont victimes de violences sexistes et sexuelles durant leur
migration. Mises au second plan des analyses scientifiques et des discours politiques,
les femmes représentent cependant la moitié des personnes entreprenant une
migration. Leur parcours est pavé d’autant plus d’embûches, notamment par l’atteinte à
leur intégrité physique, par les violences sexistes et sexuelles.
A leur arrivée, le sort est similaire : les femmes sont d’autant plus enclines à subir des
violences, et sont confrontées à une double peine. Elles cumulent la précarité, le
manque d’aide et d’accès aux soins à ces violences sexuelles. Outre les dégâts
physiques, les dégâts psychologiques apparaissent très importants, avec l'apparition de
syndrome post-traumatique engendrant une complication évidente pour recommencer
une vie dans un autre pays. Le SAME permettrait alors de leur garantir un accès
gratuit et universel aux gynécologues et professionnels de santé en capacité de
leur fournir une prise en charge adaptée.
Nous défendons une inclusion totale du droit des femmes dans la défense européenne
des droits humains, et par conséquent du droit des personnes migrantes. Il faut
renforcer la Convention d’Istanbul, ratifiée par l’Union européenne en juin 2023, mais
non ratifiée par 6 États, dont la Hongrie ou la Pologne. Cette Convention doit s’imposer
à l’ensemble des États membres de l’Union Européenne, et il faut en parallèle ajouter
des dispositions garantissant la protection aux femmes migrantes et aux demandeuses
d’asile.
A l’heure où les droits humains risquent de reculer partout en Europe, nous
pensons que le combat pour les renforcer est juste. Le SAME permettrait de
couper court aux populistes de droite, de consolider la solidarité européenne, de
faciliter les démarches administratives et de mieux défendre les femmes.
L’Europe doit être sociale ou elle ne sera pas.

